Je chante Magazine – Spécial Boris Vian – Décembre 2009

Publié le 4 février 2010

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Diane Tell enregistre des standards

de jazz adaptés par Boris Vian

Surprenante Diane Tell ! Cinq ans après « Popeline », elle se lance dans une aventure dans laquelle on ne la voyait pas a priori : un album entièrement consacré à Boris Vian, joliment intitulé « Docteur Boris et Mister Vian » !

Pour Diane, le projet d’enregistrer un disque de jazz en français remonte à trois ans. Sur son site, dianetell.com, la chanteuse tient un blog régulièrement actualisé. Le 23 juin 2009, date anniversaire de la mort de Vian, elle lui « poste » une lettre de Biarritz, sa ville adoptive… La sublime version de My one and only love de Johnny Hartman, enregistrée avec John Coltrane en 1963 sur le label Impulse, a été le déclencheur…

« Mon premier réflexe fut de chercher dans ton oeuvre d’autres merveilleuses adaptations de standards de jazz et sans faute, j’en ai trouvé tout un lot ! Une quarantaine peut-être. Venant de toi, je ne fus pas surprise. Tu aimais tellement cette musique. Que tu te sois penché sur elle, ta plume à la main, ne me surprend pas. Ce qui m’étonne encore aujourd’hui c’est qu’il existe très peu d’enregistrements de ces chansons. Quel beau travail Mister Boris. Une des plus belles matières qu’il m’ait été donné de chanter, cher Docteur Vian ! J’en ai choisi 16 et j’ai contacté le musicien, compositeur, arrangeur et auteur le plus brillant que je connaisse. L’homme de la situation. Celui qui allait créer l’ambiance musicale du projet la plus parfaite. Un son qui devrait te plaire. Ce monsieur est Laurent de Wilde. Par chance, il a accepté d’enregistrer avec moi des maquettes piano-voix et de là, nous avons construit étape par étape ce qui va devenir un des très rares albums de chansons françaises de jazz réalisés depuis les années 60. »

Prévue pour le mois de juin 2009, la sortie de l’album est reportée de quelques mois… pour cause d’ « encombrement médiatique » mais aussi pour des questions de droits. « Tu connais la musique ! Il faut une autorisation pour adapter une chanson. Plus exactement pour enregistrer et publier une adaptation d’une chanson. »

Toi qui a pris mon coeur

« Tu te souviens de My one and only love ? Cette si jolie chanson de Robert Mellin et Guy Wood ? La première fois que j’ai écouté ce morceau, c’était dans une version de John Coltrane avec Johnny Hartman. Un chef d’oeuvre ! Je l’ai apprise en anglais et l’ai même chantée à la télévision en 1991 ou 1992, je ne sais plus. Je me souviens de la belle robe longue bleue nuit que je portais ce jour-là. Une création pour l’occasion de Mine Vergès… C’est à cette époque que j’ai rencontré ton frère Alain ! Je cherchais un orgue de Barbarie pour le spectacle Marilyn Montreuil. Il m’a recommandé d’en faire fabriquer un tout neuf par monsieur Oudin. Je l’ai fait. J’ai suivi son conseil, mais je n’ai pas eu le plaisir de le revoir pour parler de toi. Il disait avoir tout un tas de textes dans ses malles… Quelle idiote de ne pas avoir pris le temps de repasser à sa boutique. Je m’en veux encore… Et puis un jour, par hasard, j’ai trouvé dans un bouquin une adaptation de cette chanson en français : Toi qui a pris mon coeur… Des nues, je suis tombée sous terre ! Depuis, je la chante à chacun de mes concerts. Figure-toi qu’aujourd’hui même, jour de cet anniversaire si célébré, le tien, j’ai reçu de l’éditeur de My one and only love l’autorisation de publier l’enregistrement que nous venons tout juste de terminer ! Drôle de coïncidence non ? »

Des seize chansons prévues, Diane Tell en propose onze. Sur l’album enregistré à Paris au studio Acousti par Alain Cluzeau, elle est accompagnée par un quatuor dirigée par Laurent de Wilde (piano, arrangements et direction musicale), Christian Brun (guitare), Darryl Hall (contrebasse), Laurent Robin (batterie). Ce sont onze superbes ballades de jazz adaptées par Vian, dont quelques unes furent enregistrées du vivant de Boris, comme J’en ai marre de l’amour (Catherine Caps), Celui qui tient le monde dans ses mains (Stephen Bruce), Ma chansonnette (Henri Salvador), Nana’s lied (Catherine Sauvage)… Les autres, souvent des standards des années 20 et 30 remis au goût du jour dans les années 50, sont — sauf erreur — parfaitement inédits en français et c’est à Diane Tell qu’il revient de les créer : Rue d’la flemme, J’voudrais encore être amoureuse, Voyage au paradis, Vous auriez bien pu, Moi sans toi, Lui, toi et moi, Toi qui a pris mon coeur… Des titres rares et un répertoire peu couru : bienvenue, Diane, au club des interprètes de Vian !

R. B.

• « Docteur Boris et Mister Vian », CD Rue Stendhal. Digital : Believe

JE CHANTE MAGAZINE N° 5 — 2ÈME ET 3ÈME TRIMESTRES 2009 — PAGE 59